Le nouveau référentiel de formation infirmière entrera en vigueur à la rentrée de septembre 2026, avec des modifications substantielles qui toucheront tous les aspects de la formation. Cette réforme, reportée d’une année pour éviter une mise en œuvre précipitée, apporte plusieurs évolutions majeures :
- 400 heures de formation supplémentaires pour atteindre 4 600 heures au total
- Renforcement de l’universitarisation avec une meilleure intégration dans le système universitaire
- Nouvelles compétences numériques obligatoires depuis 2024
- Adaptation aux évolutions du métier (consultations infirmières, droit de prescription encadré)
- Modernisation des outils pédagogiques avec de nouveaux supports
Nous vous détaillons dans cet article tous les changements à venir, leurs impacts concrets et ce qui reste encore à définir avant l’été 2025.
Pourquoi une réforme de la formation infirmière ?
Le référentiel actuel, qui date de 2009, ne correspond plus aux réalités actuelles du métier d’infirmier. Nous observons depuis plusieurs années une transformation profonde des pratiques soignantes, avec l’émergence de nouvelles responsabilités et compétences.
La directive européenne impose également une harmonisation des formations, obligeant la France à moderniser son système. Les infirmiers d’aujourd’hui exercent dans un contexte sanitaire complexe, avec des pathologies plus lourdes, des séjours hospitaliers raccourcis et une population vieillissante.
Cette réforme répond à un besoin concret : mieux préparer les futurs professionnels aux défis du terrain. Les étudiants actuels nous rapportent régulièrement un décalage entre leur formation théorique et la réalité des services de soins.
Quand le nouveau référentiel sera-t-il appliqué ?
La mise en œuvre est programmée pour septembre 2026, soit un report d’une année par rapport au calendrier initial. Cette décision, que nous saluons, évite une application précipitée comme celle de 2009.
Les textes officiels (arrêtés) seront publiés durant l’été 2025, laissant une année complète aux instituts de formation pour s’adapter. Cette période de transition permettra aux équipes pédagogiques de se former aux nouveaux programmes et de réorganiser leurs enseignements.
Nous recommandons aux futurs étudiants de suivre attentivement ces publications, car elles définiront précisément les modalités d’évaluation et les contenus d’enseignement.
Quels seront les grands axes de la réforme ?
La réforme s’articule autour de quatre axes principaux que nous avons identifiés :
L’adaptation aux nouveaux rôles infirmiers : intégration des consultations infirmières et du droit de prescription encadré dans les programmes. Ces évolutions reflètent la reconnaissance croissante des compétences infirmières.
Le renforcement numérique : les compétences numériques, obligatoires depuis 2024, seront pleinement intégrées au cursus. Nous constatons que la digitalisation des soins nécessite une formation spécifique aux outils technologiques.
La modernisation pédagogique : développement de nouveaux supports (vidéos, simulateurs, plateformes digitales) pour enrichir l’apprentissage. Cette diversification répond aux attentes des nouvelles générations d’étudiants.
L’harmonisation européenne : alignement sur les standards européens pour faciliter la mobilité professionnelle des diplômés français.
Un cursus renforcé mais toujours en 3 ans
Le diplôme conservera sa durée de 3 années, malgré les recommandations du CNPI pour une 4ème année. Cette décision résulte d’un consensus entre le Cefiec et la Fnesi, qui craignaient un impact négatif sur le recrutement.
La formation passera néanmoins de 4 200 à 4 600 heures, soit 400 heures supplémentaires réparties sur les trois années. Cette augmentation permettra d’intégrer les nouveaux contenus sans allonger le cursus.
Un débat persiste concernant l’intégration des 900 heures de travail personnel actuellement non comptabilisées. Si elles étaient incluses, le volume total approcherait les 5 500 heures, plaçant la formation française parmi les plus denses d’Europe.
Nous anticipons une intensification du rythme d’études, nécessitant une meilleure organisation personnelle des étudiants.
Vers une formation plus universitaire et reconnue
L’universitarisation, amorcée en 2009, sera renforcée avec cette réforme. Nous soutenons cette évolution qui vise à donner aux étudiants infirmiers les mêmes droits que leurs homologues universitaires.
Les bénéfices attendus incluent :
- Accès facilité aux services du CROUS (restauration, logement)
- Participation à la vie associative universitaire
- Reconnaissance académique renforcée du diplôme
- Passerelles simplifiées vers les formations de pratique avancée
Cette universitarisation complète nécessitera des accords locaux entre IFSI et universités, créant potentiellement des disparités territoriales à court terme.
Quelles compétences nouvelles pour les futurs infirmiers ?
Le nouveau référentiel intégrera plusieurs compétences émergentes que nous considérons comme essentielles :
Compétences numériques avancées : maîtrise des dossiers patients informatisés, télémédecine, objets connectés de santé. Ces outils transforment déjà les pratiques dans de nombreux services.
Consultation infirmière : capacité à mener des entretiens thérapeutiques, évaluer l’état de santé, orienter les patients. Cette compétence répond à la création officielle de consultations infirmières.
Prescription encadrée : connaissance des médicaments et dispositifs médicaux que les infirmiers peuvent prescrire selon les nouveaux textes réglementaires.
Coordination de parcours : aptitude à organiser la continuité des soins entre les différents intervenants et structures sanitaires.
Compétence | Niveau actuel | Niveau futur | Impact métier |
Numérique | Basique | Avancé | Essentiel |
Consultation | Absent | Structuré | Nouveau rôle |
Prescription | Limité | Encadré | Autonomie renforcée |
Coordination | Informel | Formalisé | Responsabilité accrue |
De quelle manière la pédagogie va évoluer ?
Les méthodes d’enseignement connaîtront une modernisation significative. Nous observons déjà dans plusieurs IFSI pilotes l’expérimentation de nouvelles approches :
Simulation haute-fidélité : utilisation de mannequins connectés et de scénarios réalistes pour l’apprentissage des gestes techniques. Cette méthode améliore la confiance des étudiants avant les stages.
Classes inversées : les étudiants préparent les cours en amont via des supports digitaux, libérant du temps pour les exercices pratiques et les échanges.
Portfolio numérique : suivi personnalisé des compétences acquises tout au long de la formation, remplaçant progressivement les livrets papier.
Apprentissage par problèmes : résolution de cas cliniques complexes en petits groupes, développant l’esprit critique et la prise de décision.
Ces évolutions nécessiteront une formation spécifique des formateurs, représentant un défi organisationnel majeur pour les IFSI.
Quels impacts sur les carrières et les salaires ?
Cette réforme devrait valoriser la profession infirmière à moyen terme. Nous anticipons plusieurs effets positifs :
Reconnaissance salariale : l’élévation du niveau de formation pourrait justifier une revalorisation des grilles indiciaires, particulièrement dans la fonction publique hospitalière.
Évolutions de carrière : les passerelles vers la pratique avancée (bloc opératoire, anesthésie, puériculture) seront facilitées par le renforcement universitaire.
Attractivité internationale : l’harmonisation européenne ouvrira des opportunités de mobilité professionnelle pour les diplômés français.
Spécialisations précoces : certains parcours permettront une orientation plus rapide vers des domaines spécifiques (gériatrie, psychiatrie, urgences).
Nous estimons que ces bénéfices se concrétiseront dans les 5 à 10 années suivant la mise en œuvre, le temps que les premiers diplômés du nouveau référentiel intègrent le marché du travail.
Ce que pensent les étudiants, formateurs et syndicats
Les retours des acteurs impliqués révèlent un accueil globalement positif, tempéré par certaines inquiétudes :
La Fnesi (étudiants) salue l’universitarisation renforcée mais s’inquiète de l’intensification du cursus. Les représentants étudiants demandent un accompagnement financier adapté à l’allongement des études.
Le Cefiec (formateurs) se félicite de l’écoute du ministère et de la co-construction de la réforme. Les formateurs craignent néanmoins le défi de leur propre montée en compétences.
L’Andep (directeurs) souligne les enjeux logistiques et budgétaires de la transition. Certains instituts devront recruter des formateurs supplémentaires et investir dans de nouveaux équipements.
Les syndicats professionnels voient dans cette réforme une reconnaissance du niveau d’expertise infirmière, tout en réclamant des mesures d’accompagnement salarial.
Ce qu’il reste à définir avant l’été 2025
Plusieurs points cruciaux attendent encore des précisions réglementaires :
Financement de la réforme : qui supportera le coût des 400 heures supplémentaires ? Les régions, principales financières des IFSI, attendent des clarifications budgétaires.
Formation des formateurs : quel accompagnement pour permettre aux équipes pédagogiques de maîtriser les nouveaux contenus ? Un plan national de formation reste à élaborer.
Modalités d’évaluation : comment seront validées les nouvelles compétences ? Les épreuves du diplôme d’État devront évoluer en conséquence.
Terrain de stage : comment adapter l’offre de stages aux nouveaux besoins formatifs ? Certaines compétences nécessiteront de nouveaux lieux d’apprentissage.
Équivalences : quel sort pour les étudiants en cours de formation lors de la transition ? Des mesures transitoires devront être définies.
Ces questions techniques conditionnent la réussite de la réforme et méritent une attention particulière dans les mois à venir.
En résumé : une réforme attendue, mais à suivre de près
Le nouveau référentiel infirmier 2026 constitue une évolution majeure, alignant enfin la formation sur les réalités contemporaines du métier. Cette modernisation, fruit d’une concertation approfondie, répond aux attentes des professionnels et des étudiants.
Nous saluons la prudence du calendrier, évitant les écueils d’une mise en œuvre précipitée. Les 400 heures supplémentaires et l’universitarisation renforcée dessinent un nouveau profil d’infirmier, mieux préparé aux défis sanitaires actuels.
Reste que le succès de cette réforme dépendra largement de son accompagnement pratique : financement, formation des formateurs, adaptation des structures. Nous recommandons aux futurs étudiants et aux professionnels en exercice de suivre attentivement les publications officielles de l’été 2025.
Cette transformation représente une opportunité historique de valoriser la profession infirmière. À nous tous, acteurs du secteur, de nous mobiliser pour en faire une réussite collective.